dimanche 16 août 2009

Définitions...

Le Petit Larousse ® offre chaque année quelques mots dont la définition a été revue et corrigée...

AIDE AU TIERS MONDE : aide payée par les pauvres des pays riches pour aider les riches des pays pauvres. (Robert Burron)


AMI - AMIE : se dit d'une personne du sexe opposé qui a ce "Je ne sais quoi" qui élimine toute envie de coucher avec elle.


AMOUR : mot en 5 lettres, trois voyelles, deux consonnes et deux idiots.


AUTO-STOPPEUSE : jeune femme généralement jolie et court vêtue qui se trouve sur votre route quand vous êtes avec votre femme.


AVOCAT : seule personne qui écrit un document de 10.000 mots et l'intitule "Sommaire". (Franz Kafka)


BABY SITTER : adolescente tenue de se conduire comme une adulte, de manière à ce que les adultes qui sortent puissent se comporter comme des adolescents.


BAGNOLE : vieille auto dont toutes les pièces font du bruit, sauf la radio.


BANQUIER : homme qui te prête un parapluie par beau temps et qui te le reprend lorsqu'il commence à pleuvoir. (Mark Twain)


CAPITALISME : Régime dans lequel l'homme exploite l'homme. En régime socialiste c'est l'inverse.


CONFIANCE : liberté que l'on accorde à une personne pour qu'elle fasse des bêtises.


CONSULTANT : celui qui retire la montre de ton poignet, te donne l'heure et te fait payer le service.


DANSE : expression verticale d'un désir horizontal.


DÉMOCRATIE : régime où tout le monde a le droit de dire que l'on est en dictature. (Georges Hahn)


DICTATURE : régime où tout le monde doit dire que l'on est en démocratie. (Georges Hahn)


DÉSILLUSION : sentiment ressenti lorsque le superbe postérieur ne coïncide pas avec le visage qui se retourne.


DIPLOMATE : celui qui te dit d'aller te faire foutre d'une telle façon que tu as très envie de commencer le voyage.


ÉCONOMISTE : expert qui saura demain pourquoi ce qu'il a prédit hier n'est pas arrivé aujourd'hui.


EXAMEN ORAL : épreuve d'admission de stagiaires à la Maison Blanche.


FACILE : se dit d'une femme qui a la même morale sexuelle que les hommes.


FEMME : ensemble de courbes qui font redresser une ligne.


GARDE-ROBES : endroit où pendent ses vêtements quand il n'y a plus de poignées de porte disponibles.


JURY : groupe de douze personnes, réunies par tirage au sort, pour décider qui, de l'accusé ou de la victime, a le meilleur avocat.


MISÈRE : situation économique qui a l'avantage de supprimer la crainte des voleurs. (Alphonse Allais)


MARIAGE : union qui permet à deux personnes de supporter des choses qu'ils n'auraient pas eu besoin de supporter s'ils étaient restés seuls.


PARENTS : deux personnes qui apprennent à un enfant à parler et à marcher, pour ensuite lui dire de s'asseoir et de fermer sa gueule.


PÉNIS : une petite racine au bout d'un gros légume.


PÉTER : éternuer dans ses sous-vêtements.


POISSON : animal dont la croissance est excessivement rapide entre le moment où il est pris et le moment où le pêcheur en fait la description à ses amis.


PROGRAMMEUR : celui qui résout un problème que vous n'aviez pas, d'une façon que vous ne comprenez pas.


PSYCHIATRE : homme intelligent qui aide les gens à devenir cinglés.


RICHESSE : seul moyen d'échapper à la misère. (Voir ce mot)


SANG-FROID : chose facile à avoir au mois de décembre.


SCOUT : petit gars habillé en niaiseux qui suit un grand niaiseux habillé en p'tit gars.


TOURISME : activité consistant à transporter des gens qui seraient mieux chez eux dans des endroits qui seraient mieux sans eux.

vendredi 14 août 2009

Jean DUCHE – Elle et lui

Comme j’étais heureux, le jour où j’ai connu Juliette ! J’étais célibataire. Je ne sais pas si vous l’avez remarqué, les célibataires ne connaissent pas leur bonheur. Certaines personnes qui voient tout en noir diront peut-être que l’espèce humaine n’est guère plus savante. Pour l’espèce humaine, je ne suis pas compétent, mais je n’ignore pas les joies du célibat, depuis que j’ai épousé Juliette.
Et puis, à quoi bon discuter ? Elle adore ça, la discussion, mais il y a un fait qu’elle devrait tout de même m’accorder : s’ils connaissaient le bonheur de leur état, les célibataires s’organiseraient pour le protéger, le défendre. Or, qu’est-ce que nous voyons tous les jours ? Ce sont précisément les célibataires qui se marient.
Elle est entrée dans ma vie par la porte du Montana, le Montana est un bar existentialiste, comme on dit, juste à côté du café de Flore. En ce temps-là il n’était pas encore encombré par des jeunes gens en chemises écossaises et pantalons noirs, ni par des jeunes femmes en vice versa. Non, ce corridor tapissé de bouteilles servait de refuge aux gens qui n’avaient pas l’air existentialiste, comme moi, ou comme Jean-Paul Sartre.
Ce soir-là, j’étais justement en train « d’interviouver » sur un tabouret ce philosophe bien connu au sujet de sa philosophie que personne ne connaît. Il faut dire que j’étais journaliste, en ce temps-là.
- L’existentialisme, dit Sartre, qu’est-ce que c’est que ça ?
- Je vous le demande, répliquai-je.
- C’est un dada, dit Sartre. Je suis un dada.
Là, je coupai net le développement de sa pensée.
- Pardon, lui dis-je, existentiellement vous n’êtes rien du tout. Donc vous n’êtes pas dada. Vous existez dada.
- Très juste, dit Sartre en sifflant un pastis. Il considéra un instant le fond de son verre.
Je respectais sa méditation, prêt à noter la déclaration que je sentais venir.
- Voilà, dit-il enfin, un pastis qui n’existe plus.
Nous en commandâmes deux autres.
- Et pourtant il existe encore, reprit-il, mais dans mon estomac. Il aurait pu avoir une existence toute différente dans le vôtre. Prenez…
- Prenez un autre pastis, intervins-je précipitamment.
C’était pour alimenter notre « interviouve ». Le barman, qui s’intéressait à la conversation dans le but de s’instruire, s’empressa de nous apporter encore deux verres, ce qui en fit quatre devant nous. Cependant Jean-Paul Sartre avait ressaisi le fil de sa pensée. Il enchaîna :
- Prenez un autre pastis…
Le barman parut un peu étonné, mais comme il avait du respect pour la philosophie il empoigna sa bouteille. Je l’arrêtai d’un geste.
- Qui dira, murmura Sartre, l’avenir de ce pastis ?
A ce moment le pastis du philosophe fut balayé par le coude d’une jeune femme qui se hissait sur le tabouret voisin. Au lieu de s’excuser, elle éclata de rire.
- L’avenir n’est à personne, dit le barman, qui venait de se convertir à l’existentialisme. Il restait trois verres. Nous en offrîmes un à la belle inconnue. Mon Dieu, comme elle riait bien ! Elle s’appelait Juliette, et je ne compris pas tout de suite que, moi, j’avais fini de rire.

Cela se passait le douze décembre, il y a un peu plus de deux ans. Le quinze décembre elle me dit qu’elle m’aimait. Je trouvai ça normal.
L’avouerai-je ? Je suis joli garçon. Du moins, je l’étais. Maintenant, je ne sais plus, peut-être que ça m’a passé. Etant d’un naturel modeste, il faut qu’on me le dise pour que je le croie. Hélas ! Plus personne ne me le dit – Sauf Juliette, mais elle est de parti pris, elle soupire « tu es beau » quand elle se sent tendre, comme elle hurle que j’ai mauvais caractère quand elle se met en colère. En ce temps-là, les femmes avaient l’habitude de me le dire. Elles ajoutaient généralement qu’elles m’adoraient. Je leur répondais qu’elles étaient adorables. Dans les quarante-huit heures j’étais l’homme de leur vie, et cela durait au moins une semaine, quelquefois plus. Tout ça afin d’expliquer, sans fatuité, que lorsque Juliette m’a avoué qu’elle m’aimait, je m’y attendais un peu. C’est la suite qui m’a surpris.
Nous étions revenus nous poser sur les tabourets du Montana, à l’heure où les lions vont boire, entre chien et loup. Je fais allusion à cette heure incertaine du crépuscule où l’homme libère ses épaules du fardeau de son labeur quotidien et accourt, l’âme guillerette, à la rencontre des femmes parées qui entrent dans la lumière électrique. Heure divine au seuil de la nuit neuve où tout recommence pour les hommes qui ne sont pas mariés.
Donc, nous étions revenus sur les tabourets du Montana.
- Je crois que je vais vous aimer, dit soudain Juliette.
- Pas d’objection, lui dis-je. Ça tombe même très bien, parce que je vous adore. J’ai un petit local où on pourra s’arranger tous les deux.
Elle eut un sourire un peu triste, sa main se posa sur ma main et la tripota tendrement.
- Vous vous gourez, dit-elle.
Je glissai un regard en coin en rencontrai ses yeux. Il n’y avait pas de plaisanterie dans l’air. Ses yeux souriaient, cependant, bien que son visage fût grave. Je sentis comme une buée qui me montait à la tête, et je me mis à sourire moi aussi, bêtement, oh ! si bêtement… Alors un imperceptible éclair de gaieté la traversa, qu’elle ne chercha pas à dissimuler, au contraire, cela voulait dire : vous m’aimez, vous venez de le comprendre, je le sais, et je veux que vous sachiez que je le sais.
- Je suis fait comme un rat, dis-je, amèrement.
- Moi aussi, dit-elle, joyeusement. Alors nous nous regardâmes bien en face, et nous partîmes tous les deux d’un grand éclat de rire, un éclat de rire comme si nous en avions pour toute notre vie.

jeudi 13 août 2009

Good night and good luck - Georges Clooney (2005)

Ce film est un hommage à Edward R. Murrow, qui prononça ce discours le 25 octobre 1958 et qui retrace la façon dont, dans les années 50, lui, présentateur du journal télévisé de CBS de l’époque, et Fred Friendly, producteur, contribuèrent à la chute du sénateur Joseph McCarthy, à l’origine de la tristement célèbre chasse aux sorcières.



« Ce discours risque de déplaire à certains et lorsque j’en aurais terminé, ils pourront accuser ce journaliste de cracher dans la soupe qui le nourrit quotidiennement et ils pourront aussi accuser votre association d’avoir en son sein un être qui véhicule des idées hérétiques et même dangereuses. Mais la solide structure des chaînes, des agences de publicité et des sponsors n’en sera pas le moins du monde altérée.
C’est par choix et non par devoir que j’ai décidé de m’entretenir avec vos journalistes à propos de la radio et de la télévision. Et quoi que je puisse vous dire, j’en assume seul l’entière responsabilité.

Notre histoire est telle que nous la faisons et s’il se trouve des historiens dans cinquante ou cent ans pour visionner une semaine d’enregistrement de nos émissions sur nos trois réseaux, ils verront des images en noir et blanc et aussi en couleur, qui seront la preuve de la décadence et de la fuite totale face aux réalités du monde où nous vivons. Nous sommes en effet riches, imposants, bien tranquilles et complaisants. Nous sommes totalement allergiques aux informations qui nous dérangent, et nos médias reflètent cet état de fait. Mais à moins de nous réveiller et de reconnaître que la télévision dans sa totalité n’est utilisée que pour distraire, divertir, amuser et isoler les gens, alors cette télévision, ceux qui la financent, ceux qui la regardent et ceux qui y travaillent, risquent de réagir un peu trop tard.

J’ai commencé ce discours en disant que notre histoire sera telle que nous la faisons. Si nous continuons ainsi, alors l’histoire se vengera et le châtiment sera à la hauteur du mal que nous aurons fait. Pendant un instant portons aux nues tout ce qui concerne les idées et l’information. Faisons un rêve et imaginons que certains dimanche soirs, à l’heure où normalement Monsieur Ed Sullivan sévit, nous avons une émission sur l’état de l’éducation en Amérique, et que, une semaine plus tard, à l’heure où sévit Monsieur Steve Allen, nous avons un reportage sur la politique américaine au Moyen-Orient. Croyez-vous que cela serait préjudiciable à l’image de nos respectables sponsors ? Croyez-vous que nos chers actionnaires pourraient sombrer dans une forte colère ? Arriverait-il malheur à plusieurs millions de téléspectateurs qui auraient été éclairés quelque peu sur des sujets qui pourraient déterminer l’avenir de notre pays ? Et par là même, l’avenir de nos entreprises ? A ceux qui disent que les américains ne regarderont pas car ils sont bien trop complaisants, indifférents et individualistes, à ceux-là je répondrai : il existe, et c’est le journaliste qui parle, de nombreuses preuves du contraire, c’est rassurant. Mais si c’était vrai, qu’ont donc à perdre ces personnes ? Parce que s’ils disent vrai, et que la télévision ne sert qu’à divertir, distraire, amuser et isoler les gens, alors notre but est loin d’être atteint, et nous devons reconnaître que la bataille est perdue.
Cet instrument peut enseigner, il peut nous éclairer et être source d’inspiration. Mais il n’a le pouvoir de faire tout cela que si nous sommes déterminés à nous en servir dans cette finalité. Autrement, il ne s’agit que de câble et de lumière dans une boîte.
Bonne nuit et bonne chance ! »
Edward R. Murrow

vendredi 7 août 2009

PHRASE DU JOUR

"Le monde est dangereux à vivre ! Non pas tant à cause de ceux qui font le mal, mais à cause de ceux qui regardent et laissent faire." (Albert Einstein)

Arsèni VERMENOSA – « Viva la libertat », 1908



Je vous apporte le salut, mes frères et la franche accolade des hommes du Cantal, car la fleur félibréenne a aujourd’hui pris racine et fleurit dans le Haut-Pays. Elle fleurit et elle y grène et en tendant l’oreille quand le vent souffle du Plomb, vous l’entendrez résonner, la belle cabrette qui chante et bourdonne au sommet.
L’âme auvergnate n’est pas encore au cimetière entre les planches d’un cercueil. Sa floraison n’est pas un ultime sursaut de vie et son parler n’est pas éteint. Les imbéciles et les lâches ont bien dit qu’elle était morte, mais ils n’ont pas dit la vérité. L’âme auvergnate est vivante, et puissante et forte, veut conquérir sa liberté.
Et du Midi et de la race méridionale, on n’entendra pas sonner le glas tant que se dressera notre Auvergne immortelle, comme un rempart dans le ciel clair, rempart de basalte et de hautes montagnes gardé par des hommes de cœur qui ont la barbe épaisse et rêche aux joues, la crête rouge et la tête dure.
Nous voulons, du fier Cantal, jusqu’à la Méditerranée, et de la Loire aux flots agités jusqu’aux Pyrénées qui étendent leur dos sous l’ardent soleil espagnol, et des Alpes jusqu’à l’océan braillard qui fume après Bordeaux, nous voulons tous parler la vieille langue maternelle et nous la parlerons, pardi !
Cela, Mistral notre roi de Provence le veut, le clame et l’affirme et tout bon Méridional qui ne le dit pas, le pense ; l’Auvergne le pense et le dit.
Pour sa langue et ses traditions, tout peuple a le devoir de se lever et n’est qu’un bâtard sans une goutte de sang noble celui qui s’en laisse dépouiller. La liberté d’écrire et de parler sa langue ne doit jamais se demander. Elle ne doit pas se demander, les enfants, il faut qu’elle se prenne sans dire à personne : S’il vous plaît.
Le Midi ! Regardez ces plaines, mes frères, ce n’est pas seulement le Quercy ; nos puys, là-haut dressent leurs fières cornes. En aval, c’est le Limousin ; plus bas, plus loin, beaucoup plus loin, c’est la Gascogne où pousse la grande vigne et comme avec un ruban d’argent notre Dordogne nous attache à ce pays. Nous sommes en Languedoc et de la haute terrasse de cet antique Castelnau, je trinque de tout cœur aux hommes de ma race, à tout le pays méridional !

dimanche 2 août 2009

Amicizia dal blog di Pasticcino

Grazie molto Pasticcino, di cuore !

"L'amico è la cometa che guida ma non obbliga, uno sguardo che scruta ma non giudica, corregge ma non umilia, è un cuore che ama ma non esige...."

Vorrei dedicare questo premio ad alcuni fedelissimi:

adamus' site

BONDEARTE

CA R T A T A D I R E S C H E

Emozioni e Sensazioni

Felinità

i love only rock and roll

il piacere di mangiare e non solo

Mondo di Paola

Patri

POESANDO E ARTISTICANDO

sacred fire

Sara

spizzichi

STELLA

Think inside and outside the box

samedi 1 août 2009

« VOLVER » de Pedro ALMODOVAR

Ce qui m’a plu dans Volver, c’est d’abord le dépaysement. La culture et les origines d’un homme qui a vécu l’Espagne d’une certaine époque, et qui a su la garder intacte en lui nous est montrée, à nous, issus d’un pays tout autre. C’est une ouverture pour notre esprit, notre culture, notre compréhension de l’autre et de l’ailleurs.

C’est un univers très singulier qui est préservé, celui de la classe ouvrière espagnole, de Madrid, des superstitions régionales, des traditions, et ça change tellement des films européens ou américains habituels, formatés et dont les scénarios, même s’ils peuvent être très bons, sont souvent prévisibles car c’est un cinéma uniformisé qui a souvent perdu ses racines. Ici, l’univers est différent, cocasse, coloré, vivant, chaud et pittoresque.

Ce qui m’a plu ensuite, c’est qu’Almodovar raconte cette histoire à la façon d’un conte, avec un humour sombre et poétique, un peu comme Tim Burton. J’ai trouvé une maîtrise chez cet auteur qui fait habilement alterner des moments légers comme dans une comédie et d’autres étranges et surnaturels comme dans un film fantastique. Cette ambivalence crée un rythme plein de rebondissements qui ne laissent aucun temps mort. L’histoire passe de drôle à émouvante, le ton de léger à grave ; le scénario est étonnant, inventif : il s’agit de portraits intimes de femmes, de morts qui sont présents au côté des vivants, le tout étant imprégné d'un humour décapant et décalé.

Il y a, d’un côté, des secrets noirs et lourds à porter comme celui de la fille de Pénélope Cruz née d’un viol incestueux, et de l’autre, des merveilleux mouvements de vitalité qui ouvrent sur l’espoir, le dynamisme et le bonheur. Il y a une lutte pour la vie. Rien n’est sinistre et pourtant Almodovar parle de sujets graves. Mine de rien, sans avoir l’air d’y toucher, il raconte des drames humains mais il enchaîne aussitôt sur des légèretés comme par pudeur. Rien n’est lourd. On revient tout le temps à la vie. Il trouve un équilibre parfait entre le fantastique et le quotidien dur, le drame et la comédie.

Les personnages sont émouvants, drôles, forts et fragiles, on a envie de sourire et de rire. Leur humanité nous gagne. Ce film est une leçon de vie, de bonheur simple, un hymne à l’amour, à l’espoir. Les épreuves parfois terribles de ces femmes nous renvoient à cette force vitale que nous avons en nous, à la solidarité sans limites que chacun de nous peut faire surgir, à la capacité à aimer, douter, redouter, vibrer, faire front.

Les différents rôles que Pedro Almodovar attribue aux acteurs sont hors du commun, tout en finesse, en retenue et pudeur : « la grand-mère revenante qui ne peut pas mourir tant qu’elle n’a pas parlé à sa fille et fait la paix avec elle » « la voisine prostituée incarnant la mauvaise vie, mais formidable et fiable amie complice », « la fille qui cherche son identité », « la mère courage qui garde un lourd secret, affronte le pire, protège son enfant, invente des trésors d’ingéniosité pour survivre coûte que coûte », « l’amie atteinte d’un cancer, qui va mourir, qui veut savoir la vérité sur la disparition de sa mère mais pas en reniant certains principes ».

C’est une histoire familiale avec tout son cortège de secrets de famille, de rumeurs, de souvenirs trop longtemps enfouis, de réconciliations et les fantômes du passé ressurgissent pour que les personnages puissent vivre en paix. C’est un film sur la vie, un regard sur la mort. Il y a beaucoup d’amour donné par les uns et les autres, beaucoup d’humilité aussi. Ce sont toutes les dimensions de l’être humain qui sont balayées et montrés dans le film : nos forces, nos faiblesses, nos réactions dans l’adversité, nos cotés sombres et lumineux avec une porte ouverte pour devenir meilleur. On apprend toujours beaucoup en allant voir derrière le miroir…

Les thèmes abordés sont universels. Pedro Almodovar parle de choses simples qui nous concernent tous, il tisse des trames de vies que nous connaissons ou côtoyons. Directement inspirés de la réalité, tout le monde peut se retrouver dans ces personnages. Il y a la vie, la vraie, telle que nous pouvons la vivre, l’amour, la mort, la souffrance, les sentiments forts. Nos forces et nos faiblesses sont là, palpables, montrées sans être dites, chacun étant libre de mettre dessus ses propres mots, pour ne jamais donner de leçons mais proposer des clefs de lecture de nos intimités.

Il faut savoir écrire ce genre d’histoire subtile, où les sentiments sont complexes, intriqués et intimes. Il faut savoir tourner ces scènes de vie prises sur le vif, qui vont fidèlement retranscrire ces sentiments tout en délicatesse, en ayant un ton juste, subtil dosage et coup d’œil qu’il faut avoir pour ne pas tomber dans le mélo, la lourdeur et les longueurs. Ce n’est pas donné à tout le monde de savoir faire ça.

Je ne suis pas une fan d’Almodovar ni de quiconque d’ailleurs. Si un film d’Almodovar sort, je vais avoir envie d’aller le voir, parce qu’il a une patte, une odeur, qu’il y a un vrai travail de professionnel derrière, du talent, que ce sont des histoires qui me parlent, qui me touchent et qui m’instruisent. Mais je ne l’encenserai pas parce que c’est Almodovar.

Ce qui m’a plu enfin, c’est l’hommage superbe que cet homme rend aux femmes, aux mères, aux filles, aux épouses et aux sœurs. Les femmes y sont à l'unisson. C’est un hymne au courage des femmes en général et à celui de 3 générations de femmes dans le film, qui se serrent les coudes, affrontent les pires épreuves et font face. C'est à la fois une histoire simple et complexe, émouvante et horrible. Les hommes n’y ont pas leur place car ils sont souvent à l'origine de ces horreurs cachées.

C’est aussi un hommage aux actrices italiennes des années 50. Pénélope Cruz devient la digne héritière de Sophia Loren avec ses yeux ourlés de noir, sa poitrine plantureuse, ces femmes incarnant la maternité et la sensualité voluptueuse que l’on retrouve dans les films de Visconti, Fellini, etc. Je suis sensible à cet héritage, à la transmission du beau et du vrai, de l’éternel féminin qui sautent d’une génération de cinéastes à l’autre.

Pour terminer, ce qui me touche toujours énormément, c’est quand un homme est capable de si bien raconter les femmes et de parler d’elles avec tant de finesse, de justesse. Il faut avoir une grande sensibilité, une sensibilité et un regard « féminin » pour connaître les femmes de la sorte et si bien les mettre en valeur. Sa sensibilité rejoint la mienne. Quand un cinéaste, en parlant de femmes et des femmes, en construisant des scénarios et des dialogues de et pour les femmes, en dirigeant des actrices, arrive à toucher le cœur et la raison de la femme que je suis, je sens une connivence forte entre lui et moi parce que je me retrouve dans ces portraits, ces scènes et ces dialogues. Je sens que c’est de moi et à moi qu’il parle, d’égal à égal et les différences de sexe sont abolies grâce à cette compréhension.